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Le livre bleu de la psychanalyse
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14 avril 2006

S’agiter comme un Diable dans un bénitier Il y a

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S’agiter comme un Diable dans un bénitier

Il y a quelques jours, dans un monastère de l’arrière-pays niçois, celui du village de Saorge, j’ai eu l’occasion de voir une fresque sur laquelle une femme était exorcisée par deux prêtres.  Elle  crachouillait deux ou trois petits démons qui lui sortaient par la bouche et s'envolaient aussitôt.

J’ai relu avec plaisir quelques textes analytiques à cette occasion.

Charcot s’était beaucoup intéressé aux diables et aux sorcières, il rapprochait les grandes épidémies de possession  du moyen-âge, telles celle des  possédées de Loudun ou encore celle des ursulines  de Saint-Médard, des grandes crises d’hystérie qu’il provoquait à volonté, avec beaucoup de séduction, dans ses services de

la Salpétrière.

Il énumérait les moyens utilisés alors  pour guérir ces convulsionnaires, « la pratique des secours ». Tantôt avec un puissant chenet on frappait le ventre à coups redoublés, tantôt « trois, quatre ou même cinq personnes montaient sur le corps de la malade ». Il paraît que ces secours étaient suivis d’un grand soulagement.

Charcot voulait sans doute ainsi démontrer l’origine ovarienne de ces formes anciennes d’hystérie.

Mais du coup, ce qui se perdait dans cette approche des faits de possession, c’est le fait qu’ils étaient liés au Diable et aux incubes, des créatures lubriques qui prenaient possession des femmes pendant leur sommeil et jouissaient d’elle, en principe à leur corps défendant.

Ce détour par les leçons du mardi de Charcot nous permet surtout de mesurer le pas franchi par Freud dans sa conception de l’attaque hystérique et surtout de souligner comment  il redonne leur plein statut aux diables et démons en proposant cette définition : "Le diable n'est certainement rien d'autre que la personnification de la vie instinctuelle inconsciente et refoulée » Il l’évoque dans un texte qu'il a consacré au caractère et à l'érotisme anal. Cette vie pulsionnelle refoulée est surtout marquée de ces liens à l’orifice anal et la violence même des moyens employés, pour lutter contre ces phénomènes de possession, en porte, elle aussi, la trace.

Dans un autre texte, sur les contes et les farces, Freud raconte également que le diable indique souvent l'endroit où se trouvent des trésors,  mais pour être sûrs de bien pouvoir les retrouver, ceux qui sont les bénéficiaires de ces précieuses informations, étaient obligés de laisser comme repère, ce qu'on appelle "une sentinelle" ou le fameux cadeau des voleurs sous forme d’excréments.

  Ernest Jones, dans son étude du cauchemar, a très longuement étudié ce rôle du Diable comme étant à la fois un substitut du père, mais aussi en tant que celui qui s’est révolté contre l’autorité de Dieu, un archange rebelle, un substitut du fils, quand ce sont des hommes qui l’évoquent ou qui l’invoquent. Quand il s’agit de femmes, les rapports avec le diable sont la représentation de rapports  incestueux avec le père qui se font cauchemars du fait de l’interdit lui-même.

Il écrit « Nous avons déjà fait remarquer que les deux caractéristiques principales du contenu latent du cauchemar sont qu’il est essentiellement sexuel et surtout incestueux. Il n’est pas nécessaire d’en dire plus sur les activités sexuelles du Diable, elles sont suffisamment illustrées par le proverbe abyssin : « lorsqu’une femme dort seule, le Diable dort avec elle. »

Mais Jones raconte aussi à son propos quelque chose d'amusant, le fait que le diable n'apparaît qu'avec le christianisme et que par contre, dans la religion juive, c'est Yahvé lui- même qui a les deux attributs du bien et du mal : "point n'est nécessaire de réfléchir longtemps sur la nature de Jéhovah pour se rendre compte qu'aux côtés d'un tel dieu, il n'y avait pas beaucoup de place laissée pour un diable". Autrement dit question méchanceté, il ne comptait pas laisser sa place.

Un autre dit "Il est dieu et diable à la fois, mais le plus souvent, il est diable".

Donc cette répartition dieu/diable est un processus de décomposition au niveau du christianisme.

Mais au moins avec ce Diable, toutes les nonnes des couvents pouvaient  rêver qu'elles faisaient l'amour. Ce ne devait pas être possible avec Yahvé. Personne n'aurait osé.

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Commentaires
M
J'allais le dire !<br /> Le Diable est présent dans le livre de Job, mais il agit sur les ordres de Dieu...
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J
Jones a dut oublier de lire le livre de job...
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  • Ce blog, écrit par Liliane Fainsilber et David Berton, sera avant tout une invitation à la découverte de la psychanalyse. Le contenu de ce site est identifié auprès de la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2272-54
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