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Le livre bleu de la psychanalyse
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14 décembre 2019

La pauvre psyché mise sous curatelle

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Comme ce dernier paragraphe de ce chapitre C, intitulé « Stimuli et sources du rêve », est important et assez complexe, je l'ai gardé, si on peut dire, pour la bonne bouche. Je trouve de plus que son déchiffrage n'est pas facile.

Je reprends le texte p. 77 de la traduction Levebvre. «  Nous découvrirons plus tard que l'énigme de la formation du rêve peut être résolue par la mise au jour d'une source de stimulation psychique insoupçonnée. Pour l'instant et provisoirement nous n'allons pas nous étonner de la surestimation des stimuli de la formation du rêve qui ne procèdent pas de la vie psychique. Ce n'est pas seulement qu'eux seuls soient faciles à trouver et même à confirmer expérimentalement ; la conception somatique de la genèse du rêve correspond de bout en bout à l'orientation de la pensée dominante aujourd'hui dans la psychiatrie. Certes la domination qu'exerce le cerveau sur l'organisme est soulignée de manière on ne peut plus expresse, mais tout ce qui pourrait prouver une indépendance de la vie psychique par rapport à des modifications organiques démontrables, où une dimension spontanée dans ses expressions, effraie nos psychiatres d'aujourd'hui, comme si en le reconnaissant on allait faire revenir les beaux jours de la philosophie de la nature et de l'âme des métaphysiciens.

J'avoue ne pas trop savoir ce qui pourrait ainsi effrayer nos psychiatres par rapport à cette philosophie. Mais Freud semble faire aux psychiatres encore un autre grief celui de mettre la psyché sous curatelle, comme si en somme elle était elle-même une malade mentale incapable d'être autonome et responsable :

«  La méfiance du psychiatre a en quelque sorte mis la psyché sous curatelle et exige maintenant qu'aucune de ses émotions ne trahissent une faculté qui lui serait propre. Mais cette attitude ne témoigne de rien d'autre que d'une confiance infime dans la validité de l'enchaînement causal qui se déploie entre le corporel et le psychique. Même quand le psychique s'identifie pour le chercheur comme étant le déclencheur primaire d'un phénomène, une investigation plus approfondie finira bien par trouver le moyen de prolonger la voie qui aboutit au fondement organique du psychique. Cela étant, quand bien même le psychique devrait par force signifier le terminus pour la connaissance qui est la nôtre aujourd'hui, ce n'est pas pour autant qu'il faut le nier. »

J'ai été regarder comment ce passage à été traduit dans l'autre traduction, celle de Meyerson : « une pareille attitude témoigne d'une confiance médiocre dans la solidité de l'enchaînement causal entre le corps et l'esprit. Souvent là où le psychique paraît être la cause primaire d'un phénomène, une recherche plus profonde arrive à en découvrir les fondements organiques. Mais il ne faudrait pas dissimuler le psychique là où il semble être, l'aboutissement momentané de nos connaissances. »

Les deux traductions semblent contradictoires à propos des liens de causalité entre le psychique et l'organique. Néanmoins elles en arrivent à la même conclusion : Le psychique serait donc pour Freud ce point de butée de la connaissance, celui à partir duquel peut surgir le rêve ou le symptôme comme trace d'un autre savoir, le savoir inconscient.

A ce propos, on peut se rappeler que Freud a déjà écrit, à cette époque, les Etudes sur l'hystérie et que de même il a traduit en allemand, les Leçons du Mardi de Charcot, ce dénommé Charcot qui pratiquait des autopsies à la mort des sujets hystériques dans l'espoir de trouver des lésions anatomiques sources de cette hystérie.

Par contre, Freud n'a pas encore écrit ses Trois essais sur la théorie de la sexualité qui datent de 1905, là où les liens entre l'organique et le psychique commencent à se préciser pour lui, avant d'aboutir bien longtemps après à la théorie des pulsions.

En attendant dans ce modeste paragraphe de l'Interprétation du rêve nous découvrons une belle charge contre les psychiatres de son temps qui étaient indifférents, si ce n'est hostiles, à la portée de la découverte freudienne.

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  • Ce blog, écrit par Liliane Fainsilber et David Berton, sera avant tout une invitation à la découverte de la psychanalyse. Le contenu de ce site est identifié auprès de la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2272-54
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