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Le livre bleu de la psychanalyse
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15 mars 2008

Souvenirs d’enfance et souvenirs-écrans

l_amour_en_medaillon_10_juin2006

Quand un analysant rencontre pour la première fois un analyste, sans doute lui décrit-il  tout d’abord ses angoisses, ses symptômes, et ses inhibitions,  il parle aussi des circonstances de sa vie mais très vite, il commence à évoquer ses souvenirs d’enfance. Or Freud a donné à quelques uns de ces souvenirs un nom plus précis, celui de « souvenirs-écrans ». C’est assez dire que ces souvenirs ne sont pas à prendre pour argent comptant, mais que, par contre, ils sont à prendre à la lettre, c'est-à-dire qu’ils sont à déchiffrer tout à fait comme le texte d’un rêve. Un souvenir-écran doit être interprété, car derrière des événements apparemment  anodins, sans intérêt,  se cachent les événements les plus importants de la vie du sujet, ce qu’on peut qualifier d’événements traumatiques, à condition bien sûr de donner à ce qualificatif sa portée exacte.

Freud a consacré deux textes à ces souvenirs-écrans, un daté de 1899, « Sur les souvenirs-écrans », le second, qui fait partie de La psychopathologie de la vie quotidienne, a pour titre « souvenirs d’enfance et souvenirs-écrans ». Le titre est en lui-même intéressant puisque il pose que tous les souvenirs d’enfance ne seraient donc pas des souvenirs-écrans.

Il écrit, dans ce dernier texte : «  je suis parti de ce fait bizarre que les premiers souvenirs d’enfance d’une personne se rapportent le plus souvent à des choses indifférentes et secondaires, alors qu’il ne reste dans la mémoire des adultes aucune trace (je parle d’une façon générale, non absolue) des impressions fortes et affectives de cette époque ». Tout a sombré dans l’amnésie des premières années de l’enfance, tout,  sauf quelques souvenirs souvent indifférents mais de plus incongrus.

Un des exemples de ces souvenirs-écrans que Freud nous indique est très intéressant car il nous démontre à quel point Freud était un lacanien avant la lettre et que, dans le déchiffrage de toutes ces petites formations de l’inconscient, il procédait toujours comme un linguiste, alors que la linguistique en tant que science n’avait même pas encore été inventée.

Un homme, l’un de ses analysants, ayant déjà eu beaucoup de déboires dans sa vie sentimentale, était l’aîné de neuf enfants et, il était âgé de quinze ans, lorsque naquit sa dernière petite sœur. Or il  semblait ne garder aucun souvenir d’avoir vu sa mère enceinte, alors que pendant ces quinze années, cela aurait du pour le moins le frapper. Seul un souvenir-écran lui permit d’en prendre conscience :

Il « finit par se rappeler qu’à l’âge de onze ou douze ans il vit un jour sa mère défaire hâtivement sa jupe devant une glace… Il complète ce souvenir en disant que ce  jour-là sa mère venait de rentrer et s’était sentie prise de douleurs inattendues. Or, le délaçage ( Aufbinden) de la jupe n’apparaît dans ce cas que comme un souvenir-écran pour accouchement (Entbindung). Il s’agit là d’un « pont verbal » dont nous retrouverons l’usage dans d’autres cas ».

En tout cas, c’est ce pont verbal AUFBINDEN === ENTBINDUNG qui permet de franchir cet écran du délaçage de la jupe à la mise au monde de l’un de ses nombreux frères et sœurs : neuf en tout.

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Commentaires
L
Merci pour cet exemple . J'ai toujours eu un peu de mal à saisir ce qu'était le souvenir-écran. là ça me paraît tout à fait clair!
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Le livre bleu de la psychanalyse
  • Ce blog, écrit par Liliane Fainsilber et David Berton, sera avant tout une invitation à la découverte de la psychanalyse. Le contenu de ce site est identifié auprès de la Bibliothèque nationale de France sous le numéro ISSN 2272-54
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